La musique, voix de la paix universelle
« Capable de réunir des peuples par-delà les conflits qui les déchirent, de créer des liens entre des hommes que tout pourrait éloigner, la musique est aussi chemin de résilience et de pardon ». Ce sont les mots de Véronique de Boisséson, directrice artistique du Festival des Heures du Collège des Bernardins, dont la 4e édition a lieu ce samedi 27 septembre, sur le thème « Les voix de la paix ».
Pacifique, la musique ?
On adhère volontiers à l’idée que la musique rassemble, qu’elle exprime une voix universelle qui anéantit les différences de culture, de religion, de milieu social dans un même élan d’apaisement et d’émotion. Gare à une lecture trop simpliste de la société, qui vous fera associer telle musique à telle communauté : que la musique classique est le divertissement des milieux aisés, le rap l’échappatoire de la violence des banlieues, et la musette, le festoiement du monde paysan… Il y a autant de genres musicaux que de groupes sociologiques différents, mais au final, quand on laisse de côté les différences pour creuser jusqu’à l’essence, il ne reste que de la musique : c’est-à-dire des notes, une harmonie, un rythme, un souffle vital. Et qui dit musique, dit émotion, sensations, beauté. On pourra toujours polémiquer sur la différence de qualité entre un morceau de rap et une symphonie de Mahler, il n’empêche que ces deux musiques, radicalement différentes, ont ceci de commun qu’elles transcendent leurs différences en sublimant les émotions de leurs auditeurs.
La musique est universelle car elle communique avec un pré-langage, qui s’adresse directement au cœur, à l’âme, au corps, qu’importe l’origine socio-culturelle de ses auditeurs. Les différences de rythme, de couleur, de timbre, ne sont que des réglages différents pour parvenir à une même fréquence : celle de la beauté, concept universel mais dont les ingrédients peuvent varier d’une culture à une autre. Ce qui importe, c’est que la musique trouve une résonance dans l’individu, qui le replace en harmonie au sein du collectif.
Revenons à la paix : en temps de crise, de tensions sociales, de conflits internationaux, la culture, et en particulier la musique, incarne presque toujours l’issue pacifique. Il y a des exemples très évidents, pour ne citer que le West eastern divan orchestra fondé par Daniel Barenboim, qui rassemble musiciens juifs et arabes autour d’une même partition. Des esprits blessés nous rétorquerons que la musique a aussi sa face sombre, que Wagner par exemple, plébiscité par le nazisme, est de la musique antisémite : instrumentalisée par un groupe de gens à une certaine époque, la musique de Wagner, prise en elle-même, n’est pourtant rien d’autre que de la musique, avec des notes, une harmonie, un rythme, soit les ingrédients essentiels susceptibles de faire frissonner de plaisir le mélomane, qu’il soit juif ou arabe… Planant au-delà des divisions humaines, la musique fait entendre une voix de fraternité et de concordance accessible à tous.
Les voix de la paix, 100 ans après la Grande Guerre
Les voix de la paix : c’est donc le thème de la 4e édition du Festival de Heures des Bernardins, à Paris, ce samedi 27 septembre, de 9h30 à 22h. Un thème qui s’inscrit au cœur des commémorations du centenaire de la guerre 14-18, mais qui redouble de résonance avec l’actualité contemporaine et les conflits en Syrie, en Ukraine, en Palestine… Au rythme des heures monastiques (matines, laudes, vêpres…), les Bernardins proposent cette année encore une journée pleine de concerts mais aussi de visites et de débats, parcourant, selon les mots de Véronique de Boisséson, « les époques en quête de ces musiques qui, si elles font écho à nos propres contradictions, ne peuvent en définitive que céder le pas à la portée universelle et intemporelle de son message de paix. »
A noter la programmation de plusieurs oeuvres d’Arvo Pärt compositeur estonien contemporain que les lecteurs de musicaeterna.fr connaissent bien, dont le Da Pacem Domine dans une version pour violes, ainsi qu’un concert de musique française du début XXe par le jeune choeur Luce del Canto, dont nous avons aussi déjà parlé sur ce blog. Gageons également que le concert des Tallis Scholars ainsi que celui du Concert spirituel ne devraient pas décevoir…