Happy 80th Birthday, Arvo Pärt !
On parle beaucoup d’Arvo Pärt sur Musicaeterna.fr, mais à l’approche de ses 80 ans, le 11 septembre 2015, c’est un hommage planétaire qui lui est rendu, à la radio, dans la presse écrite, et bien sûr au concert, avec des festivals qui lui sont spécialement dédiés, notamment à la Philharmonie de Paris. Petit tour d’horizon (non exhaustif !) d’une actualité très riche.
Article mis à jour le 10/09/15 à 15h02
On ne présente plus Arvo Pärt, compositeur vivant le plus joué au monde et qui fait la fierté de l’Estonie, son pays natal. Sa popularité dépasse largement celle du cercle fermé des mélomanes classiques, puisque des artistes tels Sigur Ros, Bjork et même Marylin Manson avouent y puiser leur l’inspiration. On l’associe souvent aux compositeurs minimalistes tels Steve Reich, John Adams, Philip Glass, mais aussi John Tavener, Henryk Gorecki ou ValentiSilvestrov. Il y a certes quelque chose de commun entre tous ces compositeurs qui ont renoué avec la tonalité, rejetant la stérilité du sérialisme, mais il faut admettre qu’avec sa technique « tintinnabuli« , Arvo Pärt a su se créer un langage vraiment unique dans le paysage de la musique contemporaine. Le cinéma a aussi beaucoup fait pour diffuser sa musique auprès d’un large public – les films qui utilisent ses partitions se chiffrent en dizaines.
3 nouveaux films documentaires
Au centre d’une actualité particulièrement riche, trois nouveaux documentaires viennent démystifier certains aspects de ce personnage connu pour sa grande discrétion. Le premier intitulé « Adam’s Passion » est consacré à la grande production qui s’est tenue en mai dernier à Tallinn dans un entrepôt de sous-marins désaffecté, avec la mise en scène par Robert Wilson de quatre de ses oeuvres : Miserere, Adam’s Lament, Tabula Rasa, et Sequentia, une pièce inédite spécialement composée pour l’occasion. Le second documentaire, intitulé The Lost Paradise, dévoile les coulisses de la collaboration entre Pärt et Wilson, et suit le compositeur dans ses déplacements sur un an entre le Japon, l’Allemagne, l’Italie, l’Estonie et le Vatican. Quant au documentaire Even If I loose Everything (« Même si je perds tout »), il est signé Dorian Supin, un cinéaste russe qui avait déjà réalisé un portrait très humain d’Arvo Pärt avec le touchant 24 préludes pour une fugue
Un nouveau disque du label ECM
Manfred Eicher, fondateur du label allemand ECM spécialisé en jazz, a énormément contribué à la diffusion de la musique de Pärt en Occident ces 30 dernières années. C’est en 1980, au volant de sa voiture entre Stuttgart et Zürich, qu’il entend une musique angélique à la radio. Il quitte alors l’autoroute et s’arrête en haut d’une colline pour écouter ces sons inédits une demie-heure durant. Profondément intrigué, il mit plus d’un an à découvrir qui était le compositeur. Bien lui en a pris de chercher, car grâce à Eicher, des dizaines d’oeuvres majeures d’Arvo Pärt ont pu être gravées et diffusées dans le monde, de Tabula Rasa à Adam’s Lament, en passant par Te Deum, Litany, Lamentate, In Principio… sans oublier la célébrissime Alina. Pour fêter à sa manière le 80e anniversaire d’Arvo Pärt, Manfred Eicher a conçu une compilation d’extraits de tous ces enregistrements mythiques, sur un double album intitulé « Musica Selecta ». Une sorte de « best of », livré dans un même design minimaliste qui a fait le succès de tous ses enregistrements.
Des dizaines d’articles, d’émissions radio, et du buzz sur les réseaux sociaux
Le 11 septembre, la radio newyorkaise Q2 music prévoit un marathon radiophonique avec la diffusion en continu de 24 heures de musique d’Arvo Pärt. En juin déjà, il était le « Compositeur de la semaine » de la radio BBC 3, chaîne équivalente à France Musique. Mais c’est incontestablement la radio estonienne Klassikraadio qui diffuse le plus sa musique – il faut juste savoir parler un peu la langue pour déchiffrer la programmation !
Dans la presse écrite, Arvo Pärt fait la « une » ce mois-ci du magazine « BBC music », avec en bonus un CD d’enregistrements live de sa musique (pas forcément de grande qualité par contre). L’article principal est signé Peter Bouteneff, par ailleurs auteur d’un ouvrage intitulé Arvo Pärt : Out of Silence, paru en mai dernier aux éditions SVS Press, qui se concentre en particulier sur la foi orthodoxe de l’artiste. Un autre article passionnant publié le 8 septembre est à découvrir gratuitement sur le site de l’autre grand magazine musical anglophone, Grammophone, rédigé par Peter Quantrill.
Sur Internet toujours, Universal Editions (éditeur des partitions de Pärt) alimente un blog intitulé « Arvo Pärt dans sa 80e année » (en anglais et en allemand), consacré à l’actualité du compositeur depuis un an, et invite les internautes à utiliser le hastag #ArvoPart80 pour partager d’autres actualités. Mais Universal Editions a surtout lancé un webzine (Musiksalon) au contenu très riche, dont le 3e numéro est consacré à Arvo Pärt, avec une somme d’articles denses et passionnants (en anglais ou en allemand uniquement).
Sur les réseaux sociaux, le mélomane Alan Teder ne rate pas une seule info concernant l’actualité du grand barbu au regard lumineux, et partage avec générosité et minutie quantité d’articles, d’annonces de concerts et autres raretés (par exemple cet enregistrement inédit) dans son groupe Facebook intitulé « Arvo Pärt fan page » – une vraie mine d’or pour les plus mordus.
Un autre hommage pour le moins original a été lancé par Peter Phillips et les Tallis Scholars qui, dans leur dernier album « Tintinnabuli » (dont nous avons parlé sur Musicaeterna.fr) ont appelé les auditeurs à prendre un « selfie » avec la pochette du disque. Toutes les photos ont ensuite été compilées dans une vidéo amusante sur YouTube, avec comme musique de fond la pièce pour choeur a cappella Which was the son of…
Des concerts à travers le monde
Jusqu’au 26 septembre, le très foisonnant Nargen Festival dirigé par le chef Tõnu Kaljuste se déploie dans plusieurs grandes villes de l’Estonie pour mettre à l’honneur les grandes oeuvres de Pärt enregistrées par le label ECM, interprétés par les plus grands spécialistes de sa musique – Vox Clamantis, le Choeur de Chambre d’Estonie, Stephen Layton et Polyphony, l’organiste Christopher Bowers-Broadbent, etc. De nombreux concerts sont à la réécoute sur la radio estonienne Klassika Raadio. Toujours en Estonie, la ville natale de Pärt – Paide – organise comme chaque année du 6 au 12 septembre son festival consacré à la grande célébrité locale.
A New York, le Metropolitan Museum invite des musiciens du New Julliard Ensemble et des danseurs du New York City Ballet pour fêter les 80 ans de Pärt lors d’un concert-évènement le 11 septembre. D’autres concerts hommages sont organisés à Amsterdam, Bergen, Moscou, Bruxelles ou encore Prague (plus d’infos – en anglais – ici). Quant à Londres, le mythique concert final du Festival des Proms au Royal Albert Hall prévoit cette année dans sa programmation le Credo, pour piano, choeur et orchestre. Une partition fracassante qui date de 1968, dernier témoin de son premier style musical, qui juxtapose des clusters de plus en plus violents à la pureté harmonique du premier prélude du Clavier bien tempéré de JS Bach. Une oeuvre que l’on pourra aussi entendre en concert à Paris, le 19 septembre.
Un grand week-end de célébration à Paris
Pour le plus grand bonheur des fans français, l’Orchestre de Paris organise en effet un week-end spécial Arvo Pärt à la Philharmonie, les 19 et 20 septembre. A l’initiative de Paavo Järvi, compatriote estonien de Pärt et actuel directeur musical de l’Orchestre de Paris, la nouvelle structure programme deux grands concerts symphoniques, et un de musique de chambre. On aura loisir à entendre des oeuvres anciennes (le Credo donc, mais aussi la Symphonie n°3 de 1971), des oeuvres plus populaires (Cantus, Summa, Tabula Rasa, Fratres) et des oeuvres plus récentes, tels Swansong (2013) et La Sindone (2005). Les parisiens seront aussi heureux d’entendre ou de réentendre Silhouette, une oeuvre de 2009 dédiée Gustave Eiffel, créée à la Salle Pleyel par l’Orchestre de Paris et Paavo Järvi en 2010.
En plus des concerts, les cinéphiles pourront assister à la projection de trois films qui font appel à la musique de Pärt (Les Invasions barbares de Denys Arcand, Gerry de Gus Van Sant, et le violent There will be blood de Paul Thomas Anderson). Quant aux discophiles, ils participeront à la tribune de critique musicale animée par David Christoffel, le dimanche 20 septembre à 18h dans les locaux de la Philharmonie. A noter aussi, en marge de ce week-end spécial, une série de conférences à la Cité de la Musique en septembre et octobre sur le thème « Minimalisme VS sérialisme« , où la musique de Pärt aura une place de choix, notamment le jeudi 8 octobre à 11h.